Nous sommes ou pas sceptiques quant à l’effondrement de notre civilisation. Quoi qu’il en soit de nos attitudes intellectuelles, de l’incrédule à l’inconscient, quelque chose suit son cours, et nos addictions énergétiques ne manquent pas de creuser la chose. Quelle peut être la position du théâtre, de l’art d’une façon générale, face à l’effondrement ?
En dehors de la gentille position du supplément d’âme et de la distraction de la comédie, la tragédie a sa place à regagner.
Les jours qui s’annoncent dans les trois décennies à venir vont écrire une tragédie dont la répétition a déjà eu lieu, et nos fameux « devoirs de mémoires » et autre positions militantes pour un autre monde annonçant le bonheur marxiste ou la décroissance contrôlée, ne sont que des rêves naïfs et le rejet d’une réalité humaine que des siècles de civilisations n’ont pas sortie d’une position politique de survie de l’espèce, et de clôture de territoires au nom de cultures, d’habitudes, de convictions religieuse.
La philosophie depuis Parménide jusqu’à Derrida, a exploré le néant, et décliné les plis d’une ontologie occidentale, dont le miroir sans tain cache le visage de l’homme.
L’homme est tragique dans sa naïveté et son égoisme. Et surtout dans son manque de « Kathékon », ce terme Grec qui signifie, ce qui est bon pour la nature. Le tragique de Descartes tient a son ignorance de l’animal, rappelons le qui ne souffre pas et n’est qu’une machine sans pensée, et sa conviction que l’homme doit domestiquer la nature.
S’il y a effondrement de civilisation, ce dernier était annoncé par les penseurs, et la positions d’autres philosophies très extrèmes comme peuvent l’être le Bouddhisme, voire les animismes, sont nettement plus conscientes de l’humilité dont notre espèce doit faire preuve face à l’univers.
Je reste convaincu comme homme de théâtre que notre art a de l’avenir, car il reste la représentation primitive par excellence. Les théâtres undergrounds (Américains, Belges) ont indiqué et annoncé une absurdité du théâtre bourgeois. Une nécessité de l’homme a inventer de la distraction et de la joie est bien sûr indispensable dans notre tragédie, mais faire de chaque jour une fête et célébrer la vie sans penser à la mort, reste une position hédoniste assez stupide, il faut savoir reconnaître le terme des choses pour précisément en apprécier l’existence. Il nous faut désormais reconstruire les liens abîmés avant qu’ils ne soient définitivement perdus, et le théâtre doit reconstruire des agoras oubliées, car il va devenir la seule éducation possible qui permettra la transmission de l’humain contre la barbarie, de l’animal contre l’objet, de la musique contre le non sens des novlangues, de l’art contre le politique.