Quand Grotowski parle de l’acteur saint, il parle d’un acteur qui ne s’attache pas à être courtisant. Or la plupart le sont. Au moins après avoir œuvré. Lors de l’exercice de l’actorat il y a un état de l’être acteur, entre la méditation et la transe. Méditation car il faut un vide en soi, et transe car on s’échappe de soi. Ce que Barba appelle la pré-expressivité, c’est précisément cet endroit du jeu, où l’on ne joue plus ( on quitte le courtisant) pour se trouver dans la chute, l’oublie du texte et son retour, le non contrôle du sens, ce que nombre de commentateur appellent le « lacher prise ».
L’entrainement de l’acteur, au sens d’Eugénio Barba, est une déconstruction de l’occidentalité qui nous contraint, et fixe nos corps, qui vise à cette pré expressivité quasi animale qui, de fait, nous ré -humanise, et donne à l’acteur une autre présence, une étrangeté de la présence dont notre « éducation » n’ a pas coutume.
La présence part de l’immobile, comme le mouvement. La parole du silence.
Il y a au théâtre un enjeu de partage, et ce qui est partagé n’est pas forcément le même pour tous. L’applaudissement est un code social, qui fait que le viser est une courtisannerie de plus, ce qu’il faut atteindre c’est fustiger la médiocrité, et poser la question du partage, de la possibilité du partage. Le théâtre est trop souvent hélas un enjeu esthétique pour le spectateur.
Il doit devenir une mise en abîme du sens de notre société.
Autre chose que cette convention courtisane et esthétique.
Un art du danger.